Les challenges du double projet
- AK
- 2 févr. 2020
- 6 min de lecture
Avoir de bonnes notes à l’école était aussi important pour moi que d’avoir de bons résultats à la gym. Ainsi, je m’investissais à 100% dans les deux.

Au Pôle Espoir de Dijon avoir de bons résultats à l’école était primordial. On nous disait tous les jours « Il faut avoir de bonnes notes à l'école, car votre carrière de gymnaste ne durera pas éternellement ». C’était également ma philosophie et celle de mes parents : l’école avant la gym. En effet, j’ai très vite compris que je ne pourrai pas vivre de mon sport. D’autre part, ce n’était pas non plus mon objectif. La gymnastique était une passion et je ne savais pas à quel moment ma carrière allait s’arrêter.
J’ai intégré l’INSEP en classe de 3ème en étant scolarisée au CNED. Avec le brevet à la fin de l’année, il était important pour moi d’avoir de bonnes notes et de me préparer au mieux pour ce premier examen. Bien que je m’entrainais environ 30 heures par semaine, l’école n’était pas mis de côté. Le suivi de la part de la scolarité et de la responsable du Pôle gym de l’INSEP était très sérieux avec des heures d’études prévues pour faire les devoirs. En Seconde et Première, le même modèle était appliqué avec des heures d’études obligatoires pour la préparation au Bac de français. Mon objectif était toujours d’avoir de bonnes notes et une mention au Bac.
A Saint-Etienne, un aménagement horaire était également prévu afin que je puisse suivre le même programme que les autres élèves lors de mon année de Terminale. Lorsque je ne pouvais pas me rendre au lycée à cause des entrainements, j’avais des cours particuliers avec les professeurs du lycée qui se déplaçaient afin de me faire rattraper les cours manqués. Beaucoup de travail personnel en dehors des heures de cours et de gym était nécessaire pour rattraper les cours et me préparer au mieux pour le Bac que j’ai obtenu la même année avec Mention.
Concilier cours et gym jusqu’au BAC n’est pas évident, mais les aménagements prévus dans les différentes structures sont bien adaptés jusqu’au lycée.

Les choses se compliquent après le Bac...
Très peu de gymnastes continuent le sport de haut-niveau tout en faisant des études. En général, c’est soit gym, soit études, mais pas les deux.
La raison ? Absence d’aménagements et manque de temps. Lorsqu’on entre dans le monde des études supérieures, il est nécessaire de BEAUCOUP TRAVAILLER. Il faut aller en cours, écouter, prendre des notes, relire ses notes, réviser, faire des recherches, plus de recherches, travailler sur des projets… En général, il reste peu de temps et d’énergie pour s’entrainer. Bien entendu, tout ce que j’ai cité précédemment va dépendre de la filière dans laquelle chacun étudie, mais également de chaque personne. Nous sommes tous différents et avons différents besoins.
Grâce à la filière « Talent » crée par l’Université Paris Dauphine, j’ai réussi à concilier le sport et les études pendant un nouveau cycle olympique.
Dire qu’il était facile de concilier les deux serait mentir…
Je devais faire 2h de transport par jour à raison de 3 jours par semaine, matin et après-midi pour aller en cours. Ensuite, une fois à la fac, il fallait écouter et participer (car oui la participation compte même à la fac). Le soir, j’avais du travail à rendre. Les jours où je n’avais pas cours, j’avais des quiz à faire, des exposés à préparer, des livres à lire, des dissertations à écrire, des cours à apprendre et à relire, des contrôles continus et partiels à préparer etc… Je n’avais jamais le temps de m’ennuyer. A tout cela s’ajoutait encore 18-20 heures de gym par semaine. Je n’avais pas le temps de m’entrainer davantage en raison de mon emploi du temps chargé. Il n’y avait jamais de pause. Même en compétition j’avais des devoirs à rendre. Lors des stages, je devais rattraper les cours pour ne pas prendre de retard. Et enfin, même avant des compétitions importantes, j’avais des contrôles à effectuer à distance. Par exemple, le matin du Test Event à Rio, je faisais un contrôle d’informatique de 2 heures, que mes camarades de classe avait eu la veille à Paris, et que je devais rendre dans la journée.
Ainsi concilier sport et études supérieures est un vrai challenge.
Cela nécessite une bonne organisation et un travail efficient. Chaque exercice réussi, chaque bonne note, chaque matière validée, et chaque année validée est une grande satisfaction. Tout cela récompense le travail accompli. Le fait de réussir à me qualifier pour des compétitions internationales était toujours une belle surprise. Je ne vous cache pas que cela me stressait quand même un peu, car je savais que j’allais manquer des cours importants et qu’il me faudrait tout rattraper (et comprendre) rapidement. Ainsi, je travaillais dans le train, dans l’avion, dans la chambre d’hôtel pour ne pas prendre trop de retard.
Après mon entrée à la fac, mis à part m’entrainer, aller en cours et réviser, je ne faisais rien d’autre de mes journées. Mais le résultat final en valait la peine : qualification aux Jeux Européens en 2015, Championne de France universitaire à deux reprises, Test Event en 2016, 3ème place au Championnat de France qualificatif pour les Jeux de Rio, remplaçante aux JO de Rio en 2016 et validation de mon diplôme à Dauphine en 2017 avec mention.

A la fin de mon BAC+2, il fallait que j’effectue un échange à l’étranger. Mon choix s’est tourné vers les les Etats-Unis où j’ai décidé de finir mon Bachelor tout en matchant dans l’équipe de gymnastique de l’Université.
Le double projet est organisé différemment outre-Atlantique. Il est beaucoup plus strict et suivi qu'en France. En effet, en France, si vous avez de mauvaises notes, personne ne vous sanctionnera. Aux Etats-Unis, une ou plusieurs mauvaises notes peut/peuvent entrainer une interdiction d’entrainements et ou de compétitions de la part des entraineurs et même de la fédération universitaire. Chaque semaine, il faut envoyer les notes obtenues pendant la semaine aux coachs et à l’ « Academic coach ». En cas de notes inférieures ou égales à C (ce qui équivaut à un 12/20 en France), des heures d’études obligatoires et des cours supplémentaires sont mis en place en plus des entrainements et des cours. La présence en cours est obligatoire sous peine de sanctions. En plus des 20 heures d’entrainements hebdomadaires, des séances quotidiennes de kiné et des cours, il faut trouver le temps de faire le travail demandé pour chaque cours : dissertations, livres et/ou textes à lire, quiz, vidéos, discussions en ligne avec d’autres étudiants, et révisions. Fini les devoirs faits en 30 minutes au lycée. Quand vous intégrez une université, des heures et des heures de travail sont nécessaires afin de rendre un devoir correct.
Lors de la saison compétitive, des heures d’études étaient mises en place lors de nos déplacements pour que le travail universitaire soit rendu dans les temps. Les professeurs ne nous autorisaient pas à envoyer nos devoirs en retard même en raison de compétitions. Aucune excuse n’était acceptée. Il fallait donc bien s’organiser afin de rendre un travail de qualité dans les temps.
En parallèle à mon diplôme aux USA, je suivais également une L3 STAPS par correspondance dans une université en France. Donc en plus des cours à ASU, de la gym, et des compétitions, je devais rattraper les cours de la L3 STAPS, écrire un mémoire, faire un stage, apprendre les cours et réviser pour les partiels passés pendant mon mois de vacances en France. Beaucoup de travail chaque jour, aucune seconde d’ennui, mais deux diplômes avec mention à la fin.
Je me suis toujours beaucoup investie dans la réussite du sport et de mes études. Réussir mon double projet me tenait à cœur et me semblait essentiel pour assurer mon futur. Beaucoup de personnes pensent qu’il est facile de concilier les deux, mais il s’agit d’un vrai challenge qui nécessite beaucoup de persévérance. Il y a eu beaucoup de larmes, de stress, de moments difficiles, d’insomnies… mais seules les personnes qui étaient proches de moi lors de ces moments de doutes en ont conscience.

Un grand merci aux personnes qui m’ont donné envie de relever ce challenge en me disant que faire du sport de haut-niveau et des études était impossible. Un grand merci également aux personnes qui m’ont soutenu dans ce projet « un peu fou ». Avec de la persévérance et beaucoup de travail , on peut avoir de belles surprises. Et à toutes les gymnastes qui font des études supérieures tout en continuant leur sport : YOU GO GIRL !
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